Au Brésil, la croissance galopante de l'élevage bovin ces dernières années se fait au détriment de la forêt.
Échange hamburgers à New York, Paris et Moscou contre forêts d'Amazonie. C'est nouveau : le Brésil gonfle ses exportations de viande bovine. Prix bas, marché désorganisé par la vache folle, capacités de croissance... le boeuf brésilien devient un acteur mondial, passant de 300 000 à 1,4 million de tonnes entre 1997 et 2004. Bonne nouvelle pour son économie, mauvais coup pour ses forêts. C'est le constat d'un rapport du Cifor (1) publié vendredi.
Pâturages. Benoît Mertens, l'un des auteurs, en explique l'origine : «Nous nous demandions d'où venait la croissance subite de la déforestation, dont le rythme annuel dépasse maintenant les 2,5 millions d'hectares, 0,5 % de la forêt brésilienne, selon l'Agence spatiale brésilienne.» Réponse : «L'essentiel provient de l'accélération des exportations de viande bovine.» Logique, puisque l'on attribue près de 80 % de la déforestation en Amazonie à la transformation d'espaces forestiers en pâturages.
Jusqu'en 1997, difficile de critiquer et d'invoquer la «hamburger connection», stigmatisée en 1980 par l'écologiste Norman Myers. Mertens rappelle que «la production brésilienne était inférieure à la consommation locale.» Elle ne l'a dépassée qu'en 1997, avec environ 6 millions de tonnes. Un quadruplement en trente ans, opéré au détriment de la forêt atlantique, puis de l'Amazonie où s'étend la forêt tropicale sur cinq millions de km2. En revanche, aujourd'hui, la croissance suit une logique d'exportation et non la satisfaction des besoins locaux. En 2004, la production devrait s'envoler à près de 8 millions de tonnes, pour plus de 1,4 million exportées. Leur valeur passant de 0,5 à 1,5 milliard de dollars.
Cette expansion de l'élevage pour l'exportation, souvent le fait de grandes exploitations (fazendas), s'est révélée particulièrement dévoreuse de forêts en Amazonie (2). La croissance du cheptel est directement responsable de la déforestation, à raison d'un hectare par tête de bétail, estiment les scientifiques. Alors que moins de 18 % du cheptel brésilien était élevé en Amazonie en 1990, on y compte maintenant plus de 30 % du total, le nombre de têtes passant de 26 à plus de 57 millions. A l'exemple de la région de São Felix de Xingu (Etat de Para) où le cheptel est passé de 22 000 têtes en 1980 à un million aujourd'hui. Une expansion facilitée par la construction de routes permettant d'alimenter les villes du sud-est et du nord-est du Brésil en viande et en lait.
Fronts pionniers. Après le constat, les recommandations. Réalistes, les scientifiques du Cifor ne font aucun crédit aux discours niant les besoins alimentaires des Brésiliens ou l'attrait des exportations pour son économie. La solution ? «Intensifier l'élevage sur les zones qui y sont déjà consacrées, et fixer les populations sur les fronts pionniers», résume Benoît Mertens. Les techniques pastorales, très extensives, n'ont en effet pas grand-chose à voir avec les densités des élevages européens. Un espoir : la durabilité des pâturages semble «bien supérieure à celle que l'on escomptait, en particulier avec l'amélioration des espèces fourragères», insiste Mertens. Mais l'aide technique lui semble insuffisante.
Il faut aussi «fixer les populations». En régularisant les propriétés foncières, ce qui permet de mieux les contrôler. Et par l'implantation de services (écoles, système de santé, commerces...) qui convaincront les petits éleveurs qu'il vaut mieux investir dans l'amélioration de leurs pâturages qu'aller déforester ailleurs si les rendements baissent. Seule cette démarche lui semble susceptible de permettre au gouvernement d'obtenir un ralentissement de la déforestation et une meilleure protection des zones les plus riches en biodiversité.
Pâturages. Benoît Mertens, l'un des auteurs, en explique l'origine : «Nous nous demandions d'où venait la croissance subite de la déforestation, dont le rythme annuel dépasse maintenant les 2,5 millions d'hectares, 0,5 % de la forêt brésilienne, selon l'Agence spatiale brésilienne.» Réponse : «L'essentiel provient de l'accélération des exportations de viande bovine.» Logique, puisque l'on attribue près de 80 % de la déforestation en Amazonie à la transformation d'espaces forestiers en pâturages.
Jusqu'en 1997, difficile de critiquer et d'invoquer la «hamburger connection», stigmatisée en 1980 par l'écologiste Norman Myers. Mertens rappelle que «la production brésilienne était inférieure à la consommation locale.» Elle ne l'a dépassée qu'en 1997, avec environ 6 millions de tonnes. Un quadruplement en trente ans, opéré au détriment de la forêt atlantique, puis de l'Amazonie où s'étend la forêt tropicale sur cinq millions de km2. En revanche, aujourd'hui, la croissance suit une logique d'exportation et non la satisfaction des besoins locaux. En 2004, la production devrait s'envoler à près de 8 millions de tonnes, pour plus de 1,4 million exportées. Leur valeur passant de 0,5 à 1,5 milliard de dollars.
Cette expansion de l'élevage pour l'exportation, souvent le fait de grandes exploitations (fazendas), s'est révélée particulièrement dévoreuse de forêts en Amazonie (2). La croissance du cheptel est directement responsable de la déforestation, à raison d'un hectare par tête de bétail, estiment les scientifiques. Alors que moins de 18 % du cheptel brésilien était élevé en Amazonie en 1990, on y compte maintenant plus de 30 % du total, le nombre de têtes passant de 26 à plus de 57 millions. A l'exemple de la région de São Felix de Xingu (Etat de Para) où le cheptel est passé de 22 000 têtes en 1980 à un million aujourd'hui. Une expansion facilitée par la construction de routes permettant d'alimenter les villes du sud-est et du nord-est du Brésil en viande et en lait.
Fronts pionniers. Après le constat, les recommandations. Réalistes, les scientifiques du Cifor ne font aucun crédit aux discours niant les besoins alimentaires des Brésiliens ou l'attrait des exportations pour son économie. La solution ? «Intensifier l'élevage sur les zones qui y sont déjà consacrées, et fixer les populations sur les fronts pionniers», résume Benoît Mertens. Les techniques pastorales, très extensives, n'ont en effet pas grand-chose à voir avec les densités des élevages européens. Un espoir : la durabilité des pâturages semble «bien supérieure à celle que l'on escomptait, en particulier avec l'amélioration des espèces fourragères», insiste Mertens. Mais l'aide technique lui semble insuffisante.
Il faut aussi «fixer les populations». En régularisant les propriétés foncières, ce qui permet de mieux les contrôler. Et par l'implantation de services (écoles, système de santé, commerces...) qui convaincront les petits éleveurs qu'il vaut mieux investir dans l'amélioration de leurs pâturages qu'aller déforester ailleurs si les rendements baissent. Seule cette démarche lui semble susceptible de permettre au gouvernement d'obtenir un ralentissement de la déforestation et une meilleure protection des zones les plus riches en biodiversité.
(1) Centre international de recherches forestières.
(2) L'Amazonie s'étend sur neuf Etats (Amazonas, Roraïma, Acre, Rodonia, Mato Grosso, Para, Amapa, Maranhão, Tocantins). 20 millions de Brésiliens y vivent.
Source : Sylvestre HUET Libération - mardi 6 avril 2004
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire