jeudi 12 février 2004

Air, eau, pesticides : les impacts sur la santé sous-estimés

PARIS - L'impact sur la santé des pollutions de l'air, de l'eau et des produits chimiques est trop peu étudié et sous-estimé par les professionnels de la santé, selon un rapport sur la santé et l'environnement remis jeudi au premier ministre, dont l'AFP a obtenu une version préliminaire.


Un comité de 22 experts a établi à la demande du gouvernement le diagnostic le plus complet à ce jour des enjeux de santé environnementale. Le gouvernement doit annoncer un plan "santé environnement" début juin.




La France est très à la traîne, notent les experts. Les études scientifiques françaises sont rares, les toxicologues et épidémiologistes trop peu nombreux, et "le corps médical et les professionnels de santé sont peu au fait des questions de santé environnementale".

Ce désintérêt explique peut-être le retard pris dans le dépistage des affections graves causées par l'amiante et le plomb (saturnisme). Entre le moment où l'amiante est déclaré cancérigène (1977) et son interdiction totale en 1997, il s'écoule par exemple 20 ans.

Les faits justifient pourtant que l'on prête attention à l'environnement, expliquent les experts. "Ainsi, la qualité chimique de l'air, dans l'habitat et en milieu ouvert urbain, est aujourd'hui considérée comme une des causes possibles de l'augmentation forte du nombre de jeunes personnes asthmatiques constatée depuis 30 ans". On constate dans les pays développés "une véritable épidémie de maladies allergiques", ajoute le rapport.

L'incidence globale des cancers a crû de 35% en 20 ans depuis 1980 à "âge égal", sans que le tabac ou l'âge puisse l'expliquer. La diffusion de certains polluants et leur accumulation dans l'alimentation, notamment du fait des activités industrielles ou des pratiques agricoles, pourrait expliquer cette recrudescence. Les experts reconnaissent que les preuves sont difficiles à établir, car il s'agit de petites doses diffusées jour après jour, qui peuvent se combiner entre elles et avoir in fine "des impacts sanitaires substantiels au plan collectif".

Ils distinguent huit domaines prioritaires :

  • Les décès liés aux infections et aux intoxications aiguës : un millier de décès par an causés par la prolifération de légionelles dans les circuits d'eau et les tours de climatisation, 15 000 décès causés en août par la canicule, 1 834 décès qui pourraient être évités dans neuf villes françaises en diminuant de moitié le niveau moyen de pollution de l'air. Tous sont "évitables" par des actions de prévention.
  • Cancer et environnement. La mortalité par cancer en France est 20% plus élevée que dans le reste de l'Europe. De nombreux agents cancérigènes sont présents dans l'environnement : tabagisme passif, radiations ionisantes, benzène (émis par les véhicules), métaux lourds, amiante, rayons ultraviolets, effluents des moteurs diesel, formaldéhyde utilisé dans le bâtiment, etc.
  • Maladies allergiques et asthme : ils sont favorisés par l'ozone, l'émission des particules fines des moteurs diesel.
  • Effets de certaines molécules chimiques sur la reproduction humaine
  • Atteintes du système nerveux sous l'effet de certains pesticides, certains gaz et de tous les solvants.
  • Bruit et santé
  • Ressources en eau (nitrates, pesticides, engrais, résidus de médicaments, hydrocarbures...)
  • Habitat et qualité de l'air

Les experts recommandent notamment la généralisation des filtres à particules sur les véhicules diesel, un meilleur suivi des femmes enceintes, particulièrement vulnérables aux produits chimiques, une formation des professionnels du bâtiment. Les produits chimiques (peintures, colles, enduits, solvants....) forment en effet une véritable "soupe" de polluants dans les logements.

Source : AFP - Yahoo ! France - Actualités - jeudi 12 février 2004, 9h13

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